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Avoir vingt ans dans les Aurès [1344]

1971 précisément | René VAUTIER

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1961, dans le Sud algérien. Des rappelés, hostiles à la guerre d'Algérie, ont été repris en mains par le lieutenant Perrin. Pris dans l'engrenage de la guerre, ils pillent, ils tuent, ils violent. Sauf Noël, un humaniste, qui a toujours refusé de se servir d'une arme. Il libère un prisonnier algérien qui doit être fusillé et fuit avec lui vers la frontière. Il est malencontreusement abattu par un nomade.
 
Ce film fait partie d'un corpus analysé par les historiens et enseignants Gilles Ollivier, Vincent Marie et Reynald Derain dans le cadre du dossier pédagogique D’un regard à l’autre : L’Algérie coloniale, la guerre d’indépendance au miroir des cinémas amateur et militant.
 
Quand le cinéma du réel empiète sur la fiction
 
La fiction comme document réaliste qui se déploie dans Avoir vingt ans dans les Aurès s’inscrit dans la même veine. Inspiré par l’histoire de Noël Favrelière, soldat français qui déserte en 1956 avec un prisonnier algérien. L’enquête réalisée dans ce cadre va très vite infléchir son orientation politique et esthétique. En effet, par ses recherches et son expérience, René Vautier est conduit à découvrir la grande misère et l’exploitation subie par les peuples africains. Ainsi, selon Thomas Votzenlogel « il se produit au cours du film, un renversement de regard. Le regard du cinéaste est d’abord porté en direction des peuples africains. Mais rapidement, la misère et l’exploitation apparaissent ; le regard se trouve alors vers cet autre invisible sur les lieux mêmes de la misère et de l’exploitation coloniale : les colons blancs ». La mise en scène de la reconstitution historique dans Avoir 20 ans dans les Aurès (1971) s’articule à mi-chemin entre fiction et documentaire par l’introduction de l’évènement dans le tournage. Les acteurs n’incarnent pas des personnages clairement définis dans le scénario, ils « performent » le processus d’isolement du groupe sur le territoire occupé et leur rapport au désert. Le choix de rendre compte de la réalité de la guerre par une image granuleuse corrobore le parti pris quasi documentaire du film.
 
La mise en scène de l’attente permet aux soldats la remémoration d’épisodes de la guerre. Ainsi à côté de courtes séquences de flash-back commentées en monologue dans une sorte de vision intérieure par les personnages, René Vautier introduit des images documentaires, comme sorties de leur mémoire. Il s’agit d’images enregistrées au moment du tournage d’Algérie en flammes. Elles montrent le sort des populations civiles déplacées, leurs villages détruits en représailles à l’aide apportée aux fellaghas, les morts de Sakiet Sidi Youssef.
 
Produire un film sur un sujet sensible : Avoir vingt ans dans les Aurès
 
L’histoire de la production de Avoir vingt ans dans les Aurès constitue un exemple particulièrement significatif pour appréhender les contraintes qui s’exercent lors de la fabrication d’un film de fiction sur un sujet sensible. Ainsi, dans ses Mémoires, René Vautier raconte la genèse et le véritable parcours de combattant de sa production. 
 
Déroulons ici le fil de ces différentes étapes. Pour réaliser Avoir vingt ans dans les Aurès, il lui a fallu à partir de témoignages, construire d’abord un scénario pour obtenir les fonds nécessaires : « j’avais ainsi accumulé un nombre impressionnant de petites cassettes audio, qui souvent se recoupent, ce qui assurait dans une certaine mesure l’authenticité des témoignages. Et puis j’ai trié et réunit les anecdotes les plus intéressantes, les plus révélatrices, les plus éclairantes ; et j’en ai fait un scénario que j’ai déposé à la commission des avances sur recettes au CNC [Centre national du cinéma] ».
 
Après son dépôt, le cinéaste reçoit ensuite une somme très inférieure à ce que la commission avançait en moyenne soit 175 000 FF de l’époque. À l’attribution de cette somme curieuse, le documentariste Joris Ivens apporta une explication venant d’un membre de ladite commission : « Pour le scénario de Vautier, nous avions beaucoup de scrupules à refuser, parce que le sujet était important sur le plan humain… mais sur le plan politique, c’était quand même nous engager dans une direction qui ne pouvait plaire à tout le monde ! Alors l’un d’entre nous a eu l’idée géniale de proposer l’attribution d’une somme assez minime pour que le film soit impossible à réaliser sans qu’un producteur n’y mette du sien et nous savions connaissant le monde très craintif de la production, que nul producteur ne soutiendrait un tel défi à l’histoire officielle. Et la commission est tombée d’accord sur cette solution d’aide réduite au minimum ».Au final, la création d’une coopérative ouvrière de production, l’UPCB (Union de production de cinéma de Bretagne), qui permet à Vautier de réaliser des films hors des circuits de productions classiques, liés à la télévision et qui n’acceptent pas les voix discordantes. Mais, même avec le soutien de l’UPCB, il n’est pas toujours facile d’obtenir les autorisations de tournage.
 
Lors de repérages en Algérie, avec pourtant le papier officiel, René Vautier rencontre des difficultés. Le cinéaste doit alors revoir ses ambitions : « après ce constat d’échec prévisible de nos contacts avec l’establishment de la production française, il ne me restait plus qu’à étudier comment tourner le film avec le quart du budget nécessaire - et comment bâtir un devis bidon pour obtenir le versement des sommes attribuées par la commission des avances et qui ne peuvent être virées au compte de la société productrice que lorsque le financement global du devis est assuré ». Finalement face à toutes ces contraintes de production, le film adopte une forme de “reconstitution documentaire” et se tourne en Tunisie avec des acteurs et techniciens plus ou moins bénévoles.
 
Extrait du film de René Vautier

René Vautier (1928 - 2015) est né à Camaret et décède à Cancale.
Il mène sa première activité militante au sein de la Résistance à l’âge de 16 ans, ce qui lui vaut plusieurs décorations. Après des études secondaires au lycée de Quimper, il est diplômé de l’IDHEC (Institut des Hautes Études Cinématographiques) en 1948, section réalisation. Sa vie, marquée par un engagement sans faille, pourrait se résumer à autant d'années de combats et de résistances cinématographiques.

En 1950, la réalisation du court-métrage Afrique 50 lui vaut une condamnation à un an de prison. Ce film reçoit la médaille d’or au festival de Varsovie. Le film sera interdit pendant plus de quarante ans.
Engagé en Afrique sur divers tournages, il rejoint le maquis algérien. Directeur du Centre Audiovisuel d’Alger (de 1961 à 1965), il y est aussi secrétaire général des Cinémas Populaires.
De retour en France, il fonde (en 1970) l’UPCB (Unité de Production Cinématographique Bretagne) dans la perspective de « filmer au pays ». En 1973, il entame une grève de la faim de 31 jours pour protester contre la censure politique vis-à-vis du cinéma. Il sera soutenu par Claude Sautet, Alain Resnais, Robert Enrico. En 1974 il reçoit un hommage spécial du jury du Film antiraciste pour l’ensemble de son œuvre.
Il fonde en 1984 une société de production indépendante « Images sans chaînes ». Il a reçu en 1998 le Grand Prix de la Société Civile des Auteurs Multimédias pour l’ensemble de son œuvre.
Parmi ses nombreux films nous pouvons citer : Avoir vingt ans dans les Aurès (1972 - Prix de la critique à Cannes), La Folle de Toujane ou comment on devient un ennemi de l’intérieur (1973), Quand tu disais Valéry (1976), Quand les femmes ont prix de la colère (1977), Marée noire, colère rouge (1978), Voyage en Giscardie (1980).

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