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Algérie 1959-1961 [22979]

Film amateur
Le drapeau français flotte en haut d'un mat sur fond de ciel bleu, un fanion noir avec une étoile rouge flotte juste dessous.

Sur une place pavée avec des palmiers, la circulation quotidienne autour d'un rond-point. Façade de ce qui semble être un théâtre. Panoramique de la place.

PE La gare de Annaba (anciennement Bône). Sur la façade : "Chemins de fer algériens". Quelques véhicules et cyclistes circulent sur la route pavée. L'horloge.
Le port de commerce, un bateau est à quai. Des pêcheurs sont assis dans leur bateau de pêche.

Des militaires font un mechoui. Ils posent tous ensemble pour la photo. Un militaire danse entouré par les soldats en cercle.
Les militaires posent pour la photo dont deux à cheval, tenant des fleurs à la main. Une femme en civil se tient au milieu des militaires. Ils posent et chantent vraisemblablement.

Un militaire se déplace sur un âne dans la campagne.
Aménagement d'un camp de tentes, les militaires retournent la terre à l'aide de pelles. Certains s'amusent sur des ânes, dans un champ fleuri, ils rient et font le signe de salut militaire. Un âne court seul dans le champ. Un homme descend de l'âne sur lequel il était. Deux militaires le rejoignent, ils tente de porter l'âne par les pattes avant.

Une inscription Sidi Bou Zit sur un mur.
Une clôture de barbelés délimite une zone. Un mouton broute de l'herbe.

Des militaires sont au repos dans un champ, leurs armes posées sur leurs sacs. Ils attendent.
Un hélicoptère de transport de troupes (PISSECKI-VERTOL-H21) s'envole, vues du bord de mer depuis l'hélicoptère.

Convoi militaire, camions et jeeps circulent sur une route de montagne, les paysages défilent. Le convoi est ralenti sur certaines routes étroites.
Dans les feuillage, un homme met son turban. PE Le paysage vallonné. L'homme est fait prisonnier.

Des avions de chasse violent dans le ciel, ils mitraillent une zone dans la campagne.
Des militaires sont en patrouille dans la campagne. Un militaire est au téléphone. La patrouille passe à travers les chemins.
Un soldat tire à la mitraillette et au fusil mitrailleur sur une route et dans une rivière. Tirs dans la forêt.
Des prisonniers blessés sont assis sur l'herbe.
Les militaires français mangent assis sur le sol. GP Un chien les regarde.

Défilé de militaires en ville et dans un stade. Défilé de soldats à pied, en voiture, en char, d'avions. Les drapeaux français flottent sur le circuit du défilé.

Fête avec des militaires et leurs femmes. Des algériens jouent de la flûte et dansent une danse traditionnelle devant les militaires français. Deux jeunes filles sont bras-dessus bras-dessous, l'une fume une cigarette. Elles dansent.
Un militaire et sa famille déjeuner dans un jardin des résidences du camp.
Un groupe d'Algériens, femmes et hommes attendent.

Feu d'artifice vues du port d'Annaba depuis un bateau.
Le port de la ville. Caméra embarquée dans un bateau qui quitte le port.
Carton "Fin".
 
Ce film fait partie d'un corpus analysé par les historiens et enseignants Gilles Ollivier, Vincent Marie et Reynald Derain dans le cadre du dossier pédagogique D’un regard à l’autre : L’Algérie coloniale, la guerre d’indépendance au miroir des cinémas amateur et militant.
 
Le film est un reportage de par sa construction au montage et le mot FIN qui le clôt. Il semble être un montage de séquences tournées à des époques différentes lors de la présence du militaire engagé et cinéaste amateur en Algérie, entre 1959 et 1961. Les plans du drapeau tricolore puis du fanion du commando de chasse servent d’ouverture et les plans tournés depuis le navire qui s’éloigne du port de Bône (actuelle Annaba), ville principale et ville de garnison d’un département créé en 1955, terminent de manière classique le film. 
 
Par les plans du drapeau tricolore et du fanion du commando la présence militaire française dans l’Algérie coloniale est d’emblée posée.
Les plans de la place, de la gare et du port de commerce de Bône contribuent à présenter l’espace urbain comme une ville occidentale. Plus particulièrement, la tour de la gare avec horloge, inspirée de l’architecture religieuse arabo-musulmane, rappelle la tour du muezzin de la mosquée : ainsi, si le film ne montre que la tour de la gare, réalisation française, il y a bien deux temps qui se font concurrence dans l’espace urbain, le temps occidental et le temps de l’Islam, même si ce dernier n’apparaît pas.
La séquence du méchoui préparé par les harkis pris en photo par les officiers français témoigne de la hiérarchie militaire et d’un regard marqué culturellement : les harkis exécutent une tradition culinaire pour le plus grand plaisir des Français qui les prennent en photo.
La danse traditionnelle qui rappelle la présence des Tirailleurs de l'Armée française dans le cadre de la guerre en Algérie va encore dans ce sens. 
Ainsi, même dans un cadre militaire, l’Algérie apparaît comme un lieu et la guerre comme un temps exotiques.
 
On retrouve les harkis et les Tirailleurs de l'Armée française un peu plus tard (TC 15:58:37:08) lors du défilé des armées, terrestre dont les blindés, de l’air et de mer. Les supplétifs algériens de l’Armée française que sont les harkis sont d’importance, notamment auprès des commandos de chasse, dans le cadre du plan du général Challe, entre 1959 et 1961, qui vise à désorganiser puis attaquer systématiquement les unités de l’Armée de libération nationale algérienne (ALN). 
 
A partir du TC 15:40:33:22 le film aborde le terrain des combats avec le bivouac dans le djebel. Campement de tentes, creusement de rigoles par des soldats, garde-à-vous surjoué, salut militaire accompagné de rires rappellent que la vie militaire est faite de beaucoup de temps à occuper, dans l’attente de l’opération.
 
En TC 15:42:05:01 on retrouve l’attente, notamment avec le plan d’ensemble des paquetages et des soldats qui attendent les ordres dans la caserne de Sidi Bou Zit.
La situation de guerre est malgré tout signifiée par la présence visuelle de barbelés dans la campagne proche, qui servent de protection contre une éventuelle attaque de nuit de l’ALN.
 
En TC 15:43:50:15 « l’hélicoptère banane » pour transport de troupes est utilisé par le cinéaste amateur pour des vues aériennes de la baie d’Annaba et des côtes escarpées ainsi que du massif de l’Edough culminant à 1008 m d’altitude. Ces images participent tout autant d’une nécessité opérationnelle militaire que d’une captation d’une géographie exotique.
L’opération militaire dans le maquis est relatée à partir du TC 15:47:13:06. On suit le convoi, qui passe près d’un village perché isolé, sur un col à la route sinueuse. Cela permet de comprendre les difficultés du terrain propices à la guérilla algérienne auxquelles l’Armée française doit faire face.
 
Le commando français est montré de manière positive : après les plans entre TC 15:51:27:00 et TC 15:51:48:24 qui montrent un Algérien fait prisonnier (un réel « fellagha » ?) puis la pause de soldats qui semblent plastronner pour prise de guerre, le film entre dans le cœur de l’opération. Ainsi, à partir de TC 15:51:48:24 des avions mitraillent un site pour « nettoyage » puis l’on suit le déplacement des hommes du commando de chasse dans le maquis après sécurisation.
Les combats ne sont qu’évoqués car si l’on voit des militaires français tirer, les plans rapprochés des impacts des balles sur le sol et dans les flaques d’eau ont été manifestement tournés à part et insérés dans le montage pour mieux faire imaginer ces combats. Cela ne signifie nullement qu’il n’y a pas eu d’accrochages, mais le militaire et cinéaste a pu alors utiliser son fusil ou n’a pas pris de risques inutiles. Par ces quelques plans ajoutés, au ralenti, le soldat-cinéaste essaie de ne pas limiter ce passage du film aux instants d’avant et d’après les combats comme c’est très souvent le cas. Cinq prisonniers algériens, dont certains blessés, sont filmés quelques instants (TC 15:58:04). Les images suivantes permettent de retrouver les militaires du commando français, détendus et mangeant au couteau leur ration. 
 
Entre TC 15:58:37:14 et TC 16:03:10:03 un défilé militaire, dans lequel toutes les armées (de terre, de l’air et de mer) sont représentées, a été filmé. Si le défilé est imposant, il semble se dérouler devant peu de badauds. En TC 16:01:13:09 notons la présence d’un caïd, fonctionnaire algérien qui remplit diverses fonctions administratives, intermédiaire entre la population algérienne et les autorités françaises. Le défilé et la séquence cherchent à affirmer la forte action militaire française dans la colonie algérienne, qui continue de contribuer à la « pacification », alors que l’évolution de la situation politique est défavorable à la métropole française.
 
La séquence qui débute en TC 16:03:10:02 est de nouveau filmée en garnison. Nous retrouvons deux harkis. L’un danse selon un mode traditionnel accompagné au flutiau par le second. Ces images contrastent avec les gros plans et plans moyens ou plans pieds qui suivent, focalisés sur deux femmes françaises, femmes ou filles de militaires : l’une fume, ce qui lui donne une certaine virilité, les deux dansent entre elles selon la mode occidentale des années soixante. La séquence se poursuit par des plans de détente et de vie de famille à l’intérieur de la caserne. Enfin, le cinéaste filme de loin un groupe de femmes en noir et portant le niqab : contrairement à la ponctuelle présence féminine française assimilée à la présence familiale, à aucun moment la femme algérienne n’est approchée dans ce film militaire, à l’univers masculin, tandis que les hommes algériens sont des subalternes, parfois étranges, ou des ennemis vaincus. 
 
L’avant dernière séquence, de TC 16:05:44:22 à TC 16:06:27:06, est consacrée à un feu d’artifice vu depuis un bateau dans le port d’Annaba. On peut prendre comme hypothèse qu’il a pu être filmé lors du 14 juillet. En tout cas, dans le montage du film, pour l’engagé cinéaste amateur, il peut avoir la fonction de célébrer la présence militaire française malgré l’évolution politiquement défavorable à la continuité de l’Algérie française.
 
En TC 16:06:27:06 l’éloignement depuis le port d’Annaba, qui semble d’ailleurs vide de toute activité, sur le navire qui vogue vers la France, relève d’un plan final classique chez l’amateur, à la portée également symbolique puisque Claude Consorti ne retournera pas en Algérie.
 
Claude Consorti (6 janvier 1937 - ) est né à Montauban (Tarn-et-Garonne).
Il fait beaucoup de photographie dès l’âge de 15 ans et s’intéresse au cinéma amateur avec des camarades lorsqu’il vit à Toulon. À 18 ans, en 1955, il s’engage dans l’armée et sera formé à Fréjus dans les troupes coloniales (armée de terre) au Centre d’Instruction de l’Infanterie Coloniale.

Il commence à filmer en 1956 quand il est envoyé à Seno au Laos. Cette passion l’amènera à tourner des images jusque dans les années 1970.

En 1956, il rejoint par voie maritime le Vietnam et débarque à Saïgon. Puis il rejoint la base de Seno au Laos où il est affecté au 5ème Régiment d’Infanterie Coloniale.
Il s’intéresse déjà au cinéma amateur, tout comme le colonel qui commandait la base militaire de Seno, mais ne pouvait pas filmer pour des raisons de sécurité. Pour avoir la possibilité de tourner des images, il assume les fonctions de reporter. Il réalise alors comme chargé de presse plusieurs reportages sur les activités militaires. Il fera en sorte de faire tirer ses films en double, pour garder un souvenir et afin de réaliser un stock d’archives.

Ce premier séjour en Asie lui a permis de découvrir le Laos et de nombreuses régions environnantes. À la base de Seno, il filme les parachutistes et les sorties en brousse. En 1957, lors d’une mission à Saïgon, il réalise un film à vocation documentaire et touristique sur la ville, de jour et de nuit, en particulier dans le quartier chinois de Cho-Lon et au jardin botanique. Ce sera son premier film monté.
En juin 1958, il est rapatrié et traverse par la route le Laos, le Cambodge, le Vietnam, par le bac le Mékong, puis les plantations de caoutchouc de Terre Rouges. Embarqué sur le « SS Cambodge », il rentre par voie maritime et débarque à Marseille en ayant filmé au passage toutes les escales et ports rencontrés, de la mer de Chine, du Golfe du Bengale, de la Mer Rouge, du Canal de Suez et de la Méditerranée.

En 1959, il est affecté au 3ème Régiment de Tirailleurs Sénégalais à Bône en Algérie (aujourd’hui Annaba), comme Sous-officier, puis, comme Chef de section à l’encadrement du Commando de chasse N°40 à Bugeaud en Algérie (aujourd’hui Seraïdi). Il y encadre des harkis, soldats algériens supplétifs de l’Armée française regroupés dans des harkas.

En 1961, il revient en France et est affecté au 4ème Régiment d’Infanterie de Marine à Toulon, en centre d’instruction.

En 1963, il part à Bouar en République Centrafricaine et y exerce la fonction de formateur des cadres des futures armées africaines.

En 1964, à la fermeture de la base, il revient en France et passe trois ans à l’École Militaire Edouard Herriot, orphelinat à la Boissière (Yvelines) dédiée à l’encadrement des enfants de troupes de l’Armée de terre.

En 1967, il rejoint comme Chef de section le Centre d’Instruction du 3ème R.I.M.A. à Vannes. Il filme alors sa famille à Molène dès qu’il le peut. La famille avait l’habitude, l’été, de regarder ensemble ses films de famille.

En 1970, il gagne par voie aérienne le Tchad pour servir à Fada (Tibesti-Ennédi) à un poste d’encadrement dans l’Armée Tchadienne.

En fin 1971, il rejoint le 21ème R.I.M.A. à Sissonne dans l’Aisne pour encadrer une section de reconnaissance de la 14ème Brigade Mécanisée.
Puis, recruté par concours, il suit à l’École Supérieure du Génie Militaire à Versailles les cours de formation de Conducteur de travaux du Génie Militaire. En 1972, il est affecté à Verdun (Meuse) pour des chantiers de rénovation de casernements, puis à la Direction des Travaux du Génie de Montauban en 1987.

En 1992, il prend sa retraite de l’Armée de terre. Il décide de s’inscrire à une formation du Diplôme d’État d’Éducateur Sportif « Sport pour tous » à Toulouse. Fin 1992, avec sa famille, il rejoint Brest et son environnement familial à l’île Molène.

En 1993, il est recruté par l’agence immobilière Continentale à Brest et tient le poste d’adjoint technique auprès du directeur de l’agence.
Il sera ensuite éducateur sportif à Brest. En parallèle, il décide de créer une association Loi 1901 pour ouvrir un club de gymnastique d’entretien, le « Club de Stretching de Brest Iroise » qui aujourd’hui encore oeuvre dans le cadre de la prévention des maladies chroniques en s’appuyant sur le stretching et la méthode Pilates.

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