Les rapports sexuels étant interdits derrière les barreaux, la sexualité n'existe toujours pas pour l'administration pénitentiaire. Chacun sait pourtant que l'activité sexuelle ne s'éteint pas à l'incarcération, et qu'au fil des ans, elle dégénère en culpabilité, en violence. «L'Amour à l'ombre» montre les épreuves de la «castration pénitentiaire» avec son cortège de souffrances et d'humiliations que provoque la dépossession de soi : profanation de son identité, promiscuité physique, faim sexuelle souvent asséchée jusqu'à l'impuissance, quête de substituts médiocres, exercice sordide d'une sexualité dérobée à la faveur des parloirs, sous l'Ïil voyeur ou gêné des gardiens. Des surveillants qui cautionnent, participent, ou exploitent pour quelques-uns, le pacte secret des rapports entre détenus. Et l'administration pénitentiaire de continuer à remplir des dossiers pour la caisse d'allocations familiales des centaines de "bébés parloirs" qui naissent chaque année !Le sujet touche par conséquent un point très sensible d'une politique carcérale en pleine mutation. La première UVF (unité de visite familiale) a ouvert à la prison des femmes de Rennes fin septembre. Pour les hommes, des expérimentations sont prévues dans les prisons de Poissy (Yvelines) et Saint-Martin-de-Ré (Charente-Maritime), alors qu'au Canada ces unités de visites familiales existent depuis plusieurs décennies. En suivant le parcours de plusieurs détenus condamnés à de longues peines, le film montre combien la privation sexuelle aggrave la sanction, ajoute de la peine à la peine, alors que les relations affectives sont un facteur de stabilité au sein des prisons, voire de réinsertion, puisque rappelons-le, tout destin d'un condamné est de sortir un jour. Trois ans de travail ont été nécessaires au réalisateur Alain-Michel BLANC et au scénariste Pierre MATHIOTE pour réaliser ce film tourné en France et au Canada. Le réalisateur a rendu régulièrement visite aux protagonistes du film, engageant une relation de confiance qui a permis de libérer leur parole sur un sujet tabou. Détenus et ex-détenus parlent de la négation de toute intimité jusqu'au long ré-apprentissage des relations avec l'autre sexe.